Eau du robinet polluée : les précautions à prendre

Combien de fois avez-vous fait ce simple geste ? Donnez un verre d'eau du robinet à votre enfant qui demande à boire. Cependant, dans certains départements, comme l'Ile-et-Vilaine, l'Yonne, l'Aude ou les Deux-Sèvres, des analyses ont régulièrement montré que l'eau pourrait être contaminée par un herbicide, l'atrazine. De nombreux téléspectateurs français ont découvert ce produit lors de la diffusion en février dernier du reportage de France 2, "Cash Investigation" sur les pesticides. On apprend que l'atrazine et ses métabolites (résidus de molécules) peuvent, à faibles doses, perturber les messages hormonaux chez les êtres vivants.

Pollution de l'eau : les risques pour les femmes enceintes

Le premier à étudier les effets de l'atrazine fut un chercheur américain, Tyrone Hayes, de l'Université de Berkeley en Californie. Ce biologiste a été mandaté par la firme suisse Syngenta, qui commercialise l'atrazine, pour étudier l'effet du produit sur les grenouilles. Il avait fait une découverte troublante. En ingérant de l'atrazine, les grenouilles mâles se sont « démasculinisées » et les grenouilles femelles « déféminisées ». Clairement, les batraciens devenaient hermaphrodites. 

En France, l'étude PÉLAGIE* a montré une impact chez l'homme de l'exposition à l'atrazine pendant la grossesse à de faibles niveaux de contamination environnementale. Avec ses équipes de l'Université de Rennes, l'épidémiologiste Sylvaine Cordier a suivi 3 femmes enceintes pendant 500 ans, afin d'évaluer les conséquences d'une exposition prénatale sur le développement des enfants. Les femmes enceintes qui avaient des taux élevés d'atrazine dans le sang étaient « 6 % plus susceptibles d'avoir un bébé avec un faible poids à la naissance et 50 % plus de risque d'avoir un bébé avec un tour de tête faible». . Peut aller jusqu'à 70 cm de circonférence en moins ! Ces études suggèrent que l'atrazine et ses métabolites peuvent avoir des effets à très faibles doses. Interdite depuis 2003, l'atrazine reste présente dans les sols et les eaux souterraines. Ce pesticide était largement utilisé depuis les années XNUMX dans les cultures de maïs. Pendant des années, de grandes quantités ont été utilisées : jusqu'à plusieurs kilos par hectare. Au fil du temps, la molécule mère de l'atrazine se décompose en plusieurs morceaux de molécules qui se recombinent avec d'autres. Ces résidus sont appelés métabolites. Cependant, nous ne connaissons absolument pas la toxicité de ces nouvelles molécules créées.

L'eau est-elle polluée dans ma ville ?

Pour savoir si votre eau du robinet contient de l'atrazine ou l'un de ses dérivés, examinez de près votre facture d'eau annuelle. Une fois par an, des informations sur la qualité de l'eau distribuée doivent y être indiquées, sur la base des contrôles effectués par l'administration chargée des affaires de santé. Sur le site, vous pouvez également trouver des informations sur la qualité de votre eau en cliquant sur une carte interactive. Votre mairie a aussi l'obligation afficher les résultats des analyses d'eau de votre municipalité. Sinon, vous pouvez demander à les voir. Sinon, sur le site du ministère des Affaires sociales et de la Santé, vous trouverez des informations sur la qualité de l'eau potable dans votre commune. Si vous habitez dans une zone d'agriculture intensive, où la culture du maïs a été ou est prédominante, il est possible que les eaux souterraines soient contaminées par l'atrazine. La législation avait fixé une limite, basée sur le principe de précaution, de 0,1 microgramme par litre. Cependant, en 2010, une nouvelle législation a augmenté cette « tolérance » des niveaux d'atrazine dans l'eau à une valeur maximale de 60 microgrammes par litre. C'est beaucoup plus que la valeur où les chercheurs ont trouvé des effets sur les populations sensibles.

François Veillerette, directeur de l'association « Générations Futures », informe sur les dangers des pesticides. Il conseille aux femmes enceintes de ne pas attendre l'interdiction de la consommation d'eau par les autorités pour arrêter de boire l'eau du robinet dans les régions où les niveaux d'atrazine dépassent les seuils : « Avec l'augmentation de la tolérance des niveaux de pesticides dans l'eau, les autorités peuvent continuer à en distribuer malgré le danger avéré pour les populations sensibles, comme les femmes enceintes. et les jeunes enfants. Je conseillerais à ces personnes d'arrêter de boire l'eau du robinet. "

Quelle eau donner à nos enfants ?

Pour les bébés et les tout-petits, privilégiez l'eau de source en bouteille plastique étiquetée « Convient à la préparation des aliments du nourrisson » (et non l'eau minérale, trop chargée en minéraux). Parce que toutes les eaux en bouteille ne sont pas égales. Certains composants en plastique peuvent être trouvés dans l'eau (marqués 3, 6 et 7 dans le symbole de la flèche triangulaire) et leurs effets sur la santé sont mal connus. L'idéal? Boire de l'eau en bouteille dans un verre. Les familles qui souhaitent continuer à boire de l'eau du robinet peuvent investir dans un appareil à osmose inverse, un appareil qui purifie l'eau de la maison pour la débarrasser de ses produits chimiques. Cependant, il est déconseillé de le donner aux bébés ou aux femmes enceintes. (voir témoignage)

Mais ces solutions agacent l'écologiste François Veillerette : « Ce n'est pas normal de ne pas pouvoir boire l'eau du robinet. Il est nécessaire refuser de trouver des pesticides dans l'eau. Il est temps de revenir à un principe de précaution à l'égard des populations fragiles et de reconquérir la bataille pour la qualité de l'eau. Ce sont nos enfants qui paieront pour les années à venir les conséquences de cette pollution de l'eau. Sous la pression des citoyens concernés et des médias, de plus en plus d'informations circulent sur l'impact des pesticides sur les problèmes de santé environnementale. Mais combien de temps faudra-t-il pour que les choses changent ? 

* L'étude PÉLAGIE (Perturbateurs Endocriniens : Etude Longitudinale sur les Anomalies de la Grossesse, de l'Infertilité et de l'Enfance) Inserm, Université de Rennes.

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