Le témoignage de parents isolés : comment s'en sortir ?

Témoignage de Marie : « Je voulais être autonome pour élever mon enfant. »Marie, 26 ans, maman de Leandro, 6 ans.

«Je suis tombée enceinte à 19 ans, avec ma chérie du lycée. J'avais des règles très irrégulières et leur absence ne m'avait pas inquiété. J'étais en train de passer le Bac et j'ai décidé d'attendre la fin des épreuves pour passer le test. J'ai alors découvert que j'étais enceinte de deux mois et demi. J'ai eu très peu de temps pour prendre une décision. Mon copain m'a dit que quelle que soit ma décision, il me soutiendrait. J'y ai pensé et j'ai décidé de garder le bébé. Je vivais avec mon père à l'époque. Je redoutais sa réaction et j'ai demandé à sa meilleure amie de lui en parler. Quand il l'a découvert, il m'a dit qu'il me soutiendrait aussi. En quelques mois, j'ai passé le code, puis le permis juste avant d'accoucher. J'avais besoin à tout prix de mon indépendance pour pouvoir m'occuper de mon bébé. A la maternité, on m'a parlé de mon jeune âge, je me sentais un peu stigmatisée. Sans avoir pris le temps de vraiment me renseigner, j'avais choisi le flacon, un peu par facilité, et je me sentais jugé. Quand mon bébé avait deux mois et demi, je suis allé au restaurant pour quelques extras. Mon premier était le jour de la fête des mères. Cela me faisait mal au cœur de ne pas être avec mon enfant, mais je me suis dit que je faisais cela pour son avenir. Quand j'ai eu assez d'argent pour prendre un appartement, nous avons déménagé en centre-ville avec le papa, mais quand Léandro avait 2 ans, nous nous sommes séparés. Je sentais que nous n'étions plus sur la même longueur d'onde. C'est comme si nous n'avions pas évolué au même rythme. Nous avons mis en place un appel en alternance : un week-end sur deux et la moitié des vacances. "

De l'adolescente à la maman

Passée d'un coup d'adolescente à maman, j'ai eu du mal à investir ces week-ends vides. Je ne pouvais pas vivre juste pour moi. J'en ai profité pour écrire un livre sur ma vie de maman solo*. Petit à petit, notre vie s'est structurée. Quand il a commencé l'école, je le réveillais à 5h45 pour aller chez une assistante maternelle, avant de commencer le travail à 7h je le récupérais à 20h. Quand il avait 6 ans, j'avais peur de perdre l'aide de la CAF : comment le garder en dehors de l'école sans y dépenser tout mon salaire ? Mon patron a été compréhensif : je n'ouvre ni ne ferme plus le food truck. Au quotidien, ce n'est pas facile d'avoir tout à gérer, de ne pouvoir compter sur personne pour toutes les tâches, de ne pas pouvoir respirer. Le côté positif c'est qu'avec Léandro, on a une relation très proche et très proche. Je le trouve mûr pour son âge. Il sait que tout ce que je fais est pour lui aussi. Il me facilite le quotidien : si je dois faire le ménage et la vaisselle avant de sortir, il se met spontanément à m'aider sans que je le lui demande. Sa devise ? « Ensemble, nous sommes plus forts.

 

 

* « Il était une fois une maman » auto-édité sur Amazon

 

 

Le témoignage de Jean-Baptiste : "Le plus difficile, c'est quand ils ont annoncé la fermeture des écoles pour coronavirus !"

Jean-Baptiste, papa d'Yvana, 9 ans.

 

« En 2016, je me suis séparé de ma compagne, la mère de ma fille. Elle s'est avérée psychologiquement instable. Je n'avais eu aucun signe avant-coureur quand nous vivions ensemble. Après la séparation, ça a empiré. J'ai donc demandé la garde exclusive de notre fille. La mère ne peut la voir que chez sa propre mère. Notre fille avait 6 ans et demi lorsqu'elle est venue vivre avec moi à temps plein. J'ai dû adapter ma vie. J'ai quitté mon entreprise où je travaillais depuis dix ans car j'avais des horaires décalés pas du tout adaptés à ma nouvelle vie de papa solo. J'avais en tête depuis longtemps de reprendre des études pour travailler chez un notaire. J'ai dû reprendre un Bac et m'inscrire à un cursus long grâce au CPF. J'ai fini par trouver un notaire à une dizaine de kilomètres de chez moi, qui a accepté de m'engager comme assistante. J'ai mis en place une petite routine avec ma fille : le matin, je la mets dans le bus qui va à l'école, puis je pars pour mon travail. Le soir, je vais la chercher après une heure de garderie. C'est là que commence ma deuxième journée : consulter le cahier de liaison et l'agenda pour faire les devoirs, préparer le dîner, ouvrir le courrier, sans oublier certains jours de récupérer le drive chez Leclerc et de faire fonctionner la machine à laver et le lave-vaisselle. Après tout ça, je prépare l'affaire pour le lendemain, la goûte dans le cartable, je fais tout le travail administratif pour la maison. Tout roule jusqu'à ce qu'un petit grain de sable vienne arrêter la machine : si mon enfant est malade, s'il y a une grève ou si la voiture est en panne… Evidemment, on n'a pas le temps de l'anticiper, le marathon de la débrouillardise commence dans l'ordre pour trouver une solution pour pouvoir aller au bureau !

L'épreuve du coronavirus pour les parents célibataires

Il n'y a personne pour prendre le relais, pas de deuxième voiture, pas de deuxième adulte pour partager les soucis. Cette expérience nous a rapprochés de ma fille : nous avons une relation très proche. Étant papa solo, pour moi ce qui a été le plus difficile c'est quand ils ont annoncé la fermeture des écoles, à cause du coronavirus. Je me sentais complètement impuissant. Je me demandais comment j'allais faire. Heureusement, tout de suite, j'ai reçu des messages d'autres parents solitaires, des amis, qui m'ont suggéré de nous organiser, de garder nos enfants l'un pour l'autre. Et puis, très vite est venue l'annonce du confinement. La question ne se posait plus : il fallait trouver notre mode de fonctionnement en restant chez nous. J'ai beaucoup de chance : ma fille est très indépendante et elle adore l'école. Chaque matin, nous nous connections pour voir les devoirs et Yvana faisait ses exercices toute seule. Au final, comme nous avons tous les deux réussi à bien travailler, j'ai même l'impression que nous avons gagné un peu en qualité de vie durant cette période !

 

Témoignage de Sarah : « Être seule la première fois, c'est vertigineux ! Sarah, 43 ans, maman de Joséphine, 6 ans et demi.

« Lorsque nous nous sommes séparés, Joséphine venait de fêter ses 5 ans. Ma première réaction a été la terreur : me retrouver sans ma fille. Je n'envisageais pas du tout la garde alternée. Il décida de partir, et au chagrin de me priver de lui ne pouvait s'ajouter celui de me priver de ma fille. Au début, nous avions convenu que Joséphine viendrait chez son papa un week-end sur deux. Je savais que c'était important qu'elle ne coupe pas le lien avec lui, mais quand tu as passé cinq ans à t'occuper de ton enfant, le voir se lever, planifier ses repas, ses bains, se coucher, être seul la première fois c'est tout simplement vertigineux . Je perdais le contrôle et réalisais qu'elle était une personne à part entière qui avait une vie sans moi, qu'une partie d'elle m'échappait. Je me sentais oisive, inutile, orpheline, ne sachant que faire de moi, tournant en rond. J'ai continué à me lever tôt et comme tout, je m'y suis habitué.

Réapprendre à prendre soin de soi en tant que parent isolé

Puis un jour je me suis dit : « Bnous, que vais-je faire de cette fois ?« Je devais comprendre que je pouvais m'autoriser le droit de profiter de cette forme de liberté que j'avais perdue ces dernières années. J'ai donc réappris à occuper ces moments, à prendre soin de moi, de ma vie de femme et de redécouvrir qu'il y a encore des choses à faire aussi ! Aujourd'hui, quand arrive le week-end, je ne sens plus ce petit pincement au cœur. Les soins ont même changé et Joséphine reste une nuit par semaine en plus avec son papa. J'ai été très touchée par le divorce douloureux de mes parents quand j'étais petite. Je suis donc assez fier aujourd'hui de l'équipe que nous formons avec son père. Nous sommes en excellents termes. Il m'envoie toujours des photos de notre puce quand il a la garde, me montrant ce qu'ils ont fait, mangé… On ne voulait pas qu'elle se sente obligée de cloisonner entre papa et maman, ni qu'elle se sente coupable si elle s'amusait avec l'un de nous. Nous sommes donc vigilants à ce qu'il circule de manière fluide dans notre triangle. Elle sait qu'il y a des règles communes, mais aussi des différences entre lui et moi : chez maman, je peux avoir un téléviseur le week-end, et chez papa plus de chocolat ! Elle a bien compris et a cette merveilleuse capacité d'adaptation des enfants. Je me dis de plus en plus que c'est ce qui fera aussi sa richesse.

La culpabilité de maman solo

Quand on est ensemble, c'est à 100%. Quand nous avons passé la journée à rire, à jouer à des jeux, à faire des activités, à danser et que l'heure vient pour elle d'aller se coucher, elle me dit " bah et toi, tu vas faire quoi maintenant ? ”. Car ne plus être accompagné du regard de l'autre est un vrai manque. Le chagrin est là aussi. Je ressens une énorme responsabilité d'être le seul référent. Souvent je me demande "Suis-je juste ? Est-ce que je vais bien là-bas ?« Du coup, j'ai tendance à trop lui parler comme un adulte et je m'en veux de ne pas avoir suffisamment préservé son univers d'enfance. Chaque jour, j'apprends à me faire confiance et à être indulgent avec moi-même. Je fais ce que je peux et je sais que le plus important est la dose infinie d'amour que je lui donne.

 

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