L'école a-t-elle laissé tomber les garçons ?

L'école a-t-elle laissé tomber les garçons ?

28 juin 2007 – L'école ne se soucie pas assez des garçons, d'où le manque d'intérêt de beaucoup d'entre eux pour la poursuite de leurs études.

C'est l'observation du psychologue William Pollack1, de la prestigieuse Harvard University School of Medicine. Cette tendance s'observe autant aux États-Unis et au Canada que dans la plupart des pays occidentaux.

Le Québec ne fait pas exception non plus : « Sept décrocheurs sur dix sont des hommes », dit-il. Le taux de décrochage atteint un sommet dans les familles défavorisées : 43 % des jeunes Québécois de ces milieux n'ont pas de diplôme d'études secondaires.

Avant même de décrocher, les garçons ont du mal à trouver leur place à l'école. « Pourtant, elles reçoivent deux fois plus d'aide que les filles », plaide William Pollack. Aux États-Unis, les enfants prennent d'assaut les classes spéciales – où se trouvent les enfants en difficulté. Ils représentent pas moins de 70 % des effectifs de ces classes.

Comment apprend-on ?

« Beaucoup de filles apprennent simplement en écoutant leurs professeurs ou en observant. Quant aux garçons, ils préfèrent apprendre en expérimentant – en le faisant eux-mêmes. La plupart des cours ne sont pas adaptés à cette façon de faire. En conséquence, un garçon peut s'ennuyer ou être agité et être étiqueté avec des problèmes de comportement, un trouble déficitaire de l'attention ou un trouble d'hyperactivité.2. "

Guillaume Pollack

« Est-ce qu'ils ont moins de capacités dès la naissance ? », lance William Pollack sous la forme d'une blague. Le psychologue ne répond pas directement à sa propre question. Mais les exemples qu'il donne pour illustrer son propos indiquent clairement qu'il n'y croit pas.

Selon lui, le système scolaire ne respecte pas les besoins spécifiques des garçons. Le temps de récréation en est un bon exemple. Pour satisfaire leur besoin de se déplacer, les écoliers de sexe masculin devraient avoir cinq périodes de récréation. « Mais ce n'est pas mal quand ils en ont un. Et parfois, il n'y en a pas du tout », déplore-t-il avec regret.

A l'université aussi

Cette disparité entre filles et garçons perdure jusqu'au collège. "Ils vont de mieux en mieux alors qu'ils réussissent moins bien qu'il y a dix ans", estime la psychologue américaine.

Dans les pays occidentaux, 33 % des femmes de 25 à 45 ans ont un diplôme universitaire contre 28 % des hommes du même groupe d'âge3. L'écart devrait donc encore se creuser au cours des prochaines années.

William Pollack cite des sondages auprès d'étudiants universitaires. Les premiers consacrent à peine trois heures à leurs études sur une semaine. Les jeunes femmes en font cinq fois plus !

Jouez pour être de « vrais gars »

Pourquoi les enfants et les jeunes hommes rencontrent-ils tant d'épreuves sur le chemin de la réussite scolaire ? William Pollack l'explique dans une phrase choquante : « Ils se sentent 'déconnectés' d'eux-mêmes et de la société. "

Parfois inconsciemment, la famille et l'école leur apprennent à se conformer à ce que devrait être, selon lui, un homme « dur, dominant », macho. Résultat : ils apprennent à cacher leurs vraies émotions. "Beaucoup de garçons sont tristes, isolés et perturbés même s'ils semblent à première vue durs, heureux ou confiants", affirme-t-il dans son livre à succès, De vrais garçons4.

Le risque est alors grand, pour eux, de perdre du terrain. Que l'on pense à la toxicomanie, à la dépression ou au suicide auxquels ils sont plus exposés, rappelle le chercheur.

Reconnectez-vous avec eux

Que faire alors pour les aider ? « Ayez un engagement émotionnel », s'exclame-t-il. Les parents comme les enseignants doivent, selon lui, renouer avec les garçons : jouer avec eux, écouter ce qu'ils ont à dire… est si précieux pour les enfants.

William Pollack attire l'attention sur les expérimentations menées pour favoriser la réussite scolaire des écoliers5, y compris le mentorat. « Dans toutes les écoles où le mentorat a été mis en place, le taux de décrochage a baissé. Chaque garçon pourrait alors créer un lien particulier avec son mentor », explique-t-il. L'impact a été immense.

« Nous sommes si puissants », poursuit le psychologue avec enthousiasme. Nous pouvons inverser la tendance… et aider nos enfants non seulement à 4 ou 5 ans, mais tout au long de leur vie ! "

 

Des enfants talentueux et heureux ?

Être dévoué aux enfants peut rapporter gros. William Pollack nous le rappelle en soulignant comment le contexte affectueux et chaleureux de la famille et de l'école peut avoir un impact sur la réussite des enfants.

  • Un enfant qui reçoit le soutien d'au moins un parent à la maison a 4 fois plus chances de réussite en classe et dans la vie.
  • Un enfant qui peut compter sur quelqu'un de compréhensif envers lui à l'école a 4 fois plus chances de réussite en classe et dans la vie.
  • Un enfant qui a le soutien d'au moins un parent à la maison et qui peut compter sur quelqu'un de compréhensif à l'école a 14 fois plus chances de réussite en classe et dans la vie.

 

Johanne Lauzon – PasseportSanté.net

 

1. William Pollack est l'auteur de De vrais garçons, un livre sorti en librairie aux États-Unis à la fin des années 1990. Il a aussi écrit De vraies voix de garçons et Cahier d'exercices de vrais garçons. Il a donné une conférence dans le cadre du 13e édition de la Conférence de Montréal qui s'est déroulée du 18 au 21 juin 2007.

2. Traduction libre, extrait de De vrais garçons : www.williampollack.com [consulté le 27 juin 2007].

3. Données de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), citées par William Pollack.

4. De vrais garçons a été publié en français : Pollack W. De vrais gars, Varennes, Éditions AdA-Inc, 2001, 665 p.

5. William Pollack a fait référence aux travaux de Robert Pianta de l'Université de Virginie. Un exemple : Hamre BK, Pianta RC. Le soutien pédagogique et émotionnel en classe de première année peut-il faire la différence pour les enfants à risque d'échec scolaire ?, Dev enfant, 2005 Sep-Oct;76(5):949-67.

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