Hypersexualisation : quand les petites filles jouent aux lolitas

Hypersexualisation des filles américaines

Aux États-Unis et au Canada, le phénomène existe depuis des décennies. Concours de beauté, émissions de télévision, les petites filles sont idolâtrées, mises en scène sur le petit écran,en petites tenues. Récemment, Jenny Erikson, en Californie, a déclaré au blog « The Stir » qu'elle autoriserait sa fille de 9 ans à porter la nouvelle collection de la la ligne de lingerie sensuelle Victoria's Secret. Elle a même dû s'expliquer devant les millions de téléspectateurs d'une émission télévisée très populaire, « Good Morning America » : « Je ne pense pas que ce soit mal d'avoir de jolies culottes et soutiens-gorge d'une boutique pour adultes. Je ne tolérerai pas que ma fille Hannah soit « la fille aux sous-vêtements moches » lors de séjours dans des camps de jeunes ou lors de soirées pyjama avec des copines. ” ahurissant. Symptomatique, diront les psys français.  

Autre exemple, récemment, une maman australienne Amy Cheney, a fait une drôle de découverte dans la chambre de sa fille de 7 ans.Elle avait écrit son programme… minceur ! Si jeune, elle s'impose « Faites 17 pompes par jour », manger "Trois pommes, deux poires, deux kiwis"pour rester en forme, « Faites du jogging et descendez la route trois fois par semaine ». Sa mère, Amy Cheney accuse le culte de la minceur et les médias de « pervertir » sa petite fille.

En France : prévenir plutôt que guérir…

Plusieurs ministres, sénateurs et présidents d'ONG tirent la sonnette d'alarme depuis une dizaine d'années. Des décisions importantes ont déjà été prises pour protéger les enfants.

En décembre 2010, le magazine Vogue françaisposté des photos mettant en scène une jeune fille dans des tenues et des postures suggestives. Suite à ce tollé médiatique, en février 2011, le médecin scolaire, le docteur Elisabeth Pino a publié une pétition en ligne contre l'érotisation de l'image des enfants dans la publicité. En 2012, Roselyne Bachelot,ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, s'était vu remettre une charte sur « La protection de l'enfant dans les médias », signée par les membres du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et du Syndicat de la presse magazine (SPM). Les signataires du texte, rédigé par Jacques Hintzy, le président de l'Unicef ​​France, se sont engagés à ne pas « diffuser, y compris dans les espaces publicitaires, des images hypersexualisées d'enfants, de filles et de garçons, notamment en scène érotique ou portant des vêtements, des accessoires. ou du maquillage à forte connotation érotique ».

Une loi française contre l'hypersexualisation

Un an plus tard, en mars 2012, la sénatrice Chantal Jouanno a remis son rapport intitulé " Contre l'hypersexualisation, un nouveau combat pour l'égalité ". Elle dresse un état des lieux de l'image des jeunes filles et de son usage dans la presse et la publicité.

Mars 2013, cette fois, le sénateur va plus loin :elle a déposé un projet de loi sur le sujet pour réglementer l'utilisation des images d'enfants pour une marque ou à la télévision.

Elle dénonce une société qui "utilise la sexualisation précoce des jeunes filles pour" vendre "des rêves ou une marque commerciale".

Événement récent, Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes et Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la Famille, ont décidé de superviser les prochaines sessions des compétitions régionales « Seed of miss ».Ouvertes aux filles de 6 à 13 ans, ces compétitions se dérouleront en 2013, mais avec des règles précises. Deux députés français ont soulevé la question lors de la sélection pour le concours de Bordeaux en septembre 2012. Ils ont demandé au gouvernement « d'interdire la promotion d'images sexualisées d'enfants ainsi que les concours d'apparence mettant en scène de jeunes mineurs. ".

… Ou s'alarmer pour rien ?

Même si la France est moins exposée que les USA, il y a, selon Catherine Monnot, anthropologue, une hypersexualisation du corps notamment à travers les médias et l'industrie de la cosmétique et de l'habillement.

Hypersexualisation : l'avis des experts

Le sociologue Michel Fize trouve au contraire excessif la facture de Mme Jouanno.« On a raison de s'alarmer des projections de certains parents quand on parle des concours de mini miss, mais il ne faut pas tout mélanger». Auteur de "  De nouvelles adolescentes » Publié en 2010, il met en scène des petites filles de 8-9 ans vivant leur "Petite adolescence". Son constat : « ces derniers n'étaient pas du tout vécus comme des petites lolitas. Les symboles de leur féminité étaient assumés, recherchés et vécus avec une grande fierté. Le passage de l'enfance à l'adolescence s'accompagne chez les filles d'attitudes prépubères depuis la nuit des temps. Se maquiller devant le miroir, enfiler les talons de maman, toutes les jeunes filles (ou garçons) l'ont fait, ou presque ». Il dénonce le terme utilisé par Chantal Jouanno de « femme objet ». « Ces jeunes filles ne se considèrent pas du tout comme des objets. Ce sont des fantasmes d'adultes. Si un adulte a du mal avec les images de jeunes filles maquillées très simplement, c'est l'adulte qui a le problème, pas l'enfant ».

Pour le sociologue la vraie question est à la frontière entre privé et public : ”  les parents doivent être les garants de la frontière entre la sphère privée et la sphère publique. Ils doivent éduquer leurs filles pour éviter tout dérapage public. Quant à vouloir interdire l'utilisation de très jeunes filles dans la publicité, ce serait une illusion ! Que nous créions une nouvelle loi pour interdire certaines images ne résoudra pas le fait que les jeunes sont de toute façon exposés à des images féminines et genrées à la télévision ou sur Internet ».  

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