Virus Zika et femmes enceintes : recommandations

Virus Zika et grossesse : on fait le point

Un bref rappel des faits

Depuis 2015, une forte épidémie du virus Zika affecte l'Amérique centrale et du Sud. Identifié depuis 1947 en Afrique subsaharienne, le virus s'est installé en Polynésie en 2013 et aurait probablement atteint le continent américain en 2014, lors de la coupe du monde de football au Brésil. Elle est désormais identifiée dans d'autres pays du continent comme le Pérou, le Venezuela, la Colombie, la Guyane, les Antilles ou encore le Mexique. Le 1er février 2016, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que le virus Zika était « » une urgence mondiale de santé publique ».

Cette maladie est en effet susceptible de se transmettre sexuellement, même par la salive, et surtoutprovoquer des malformations cérébrales chez les fœtus exposés au viruss. Nous avons fait le point avec le Dr Olivier Ami, secrétaire général du Conseil national professionnel de gynécologie et d'obstétrique (CNPGO).

Définition, transmission et symptômes du virus Zika

Le virus Zika est un flavivirus de la même famille que les virus de la dengue et de la fièvre jaune. Il est porté par le même moustique, c'est-à-dire le moustique tigre (genre Aedes). Une seule piqûre peut suffire à contracter ce virus, à condition que le moustique en soit porteur.

Ce qui rend la détection du virus d'autant plus difficile, c'est qu'il peut être asymptomatique (dans plus des 3/4 des cas), et ne déclencher aucun signe particulier. Lorsqu'il est symptomatique, le virus provoque symptômes pseudo-grippaux, tels que fièvre, douleurs musculaires et articulaires, malaise, maux de tête, éruptions cutanées ou encore conjonctivite. Le plus souvent bénins, ces symptômes disparaissent entre 2 à 7 jours après avoir contracté le virus. Malheureusement, chez les femmes enceintes, ce virus est sensible àaffecter le développement cérébral du fœtus, c'est pourquoi les femmes enceintes doivent être particulièrement surveillées.

Côté diagnostic, il repose sur un simple analyse de sang ou échantillon de salive ou d'urine dans laquelle on recherchera des traces du virus, plus précisément son patrimoine génétique. Mais évidemment, seule la présence de symptômes poussera les équipes médicales à suspecter le virus. Si ce dernier est présent chez un individu, alors les médecins peuvent décider de mettre en culture le virus en laboratoire pour mesurer son potentiel infectieux et en savoir plus sur sa dangerosité.

Zika et grossesse : un risque de malformation fœtale

A l'heure actuelle, il n'est plus question de savoir si le virus Zika est bien la cause des malformations cérébrales observées chez les fœtus exposés. " Les autorités brésiliennes ont lancé une alerte, sur recommandation des médecins, car elles ont déclaré et identifié un nombre anormal de cas d'enfants atteints de petit tour de tête (microcéphalie) et/ou anomalies cérébrales visibles à l'échographie et à la naissance Dit le Dr Ami. D'autre part, " il n'y a aucune certitude quant au nombre de microcéphalies avérées. Cette anomalie cérébrale est d'autant plus préoccupante qu'elle est lié au retard mental " Plus le périmètre crânien est petit, plus le risque de retard mental est grand », explique le Dr Ami.

Cependant, le secrétaire général du CNPGO reste prudent : il considère queun périmètre crânien en limite inférieure ne doit pas conduire à considérer que l'enfant aura nécessairement un retard mental, la définition même de la microcéphalie n'étant pas claire. De même, ce n'est pas parce qu'un une femme enceinte a le virus Zika qu'elle le transmettra inévitablement à son bébé. " Aujourd'hui, lorsqu'une femme enceinte contracte le virus Zika, personne ne peut prédire le pourcentage de risque qu'elle le transmette à son bébé. Personne ne peut dire non plus quel est le pourcentage de risque que le fœtus infecté développe une microcéphalie.. « Clairement, à l'heure actuelle », nous savons juste que quelque chose se passe et quedes mesures doivent être prises pour réduire l'exposition des femmes enceintes », résume le Dr Ami.

La période de grossesse considérée comme la plus critique pour le virus Zika serait entre le 1est un 2ème trimestre, une période où le crâne et le cerveau du fœtus sont en plein développement.

Zika et grossesse : les précautions à prendre

Compte tenu des risques possibles pour le fœtus, il est évident que le principe de précaution est de mise. Les autorités françaises déconseillent donc aux femmes enceintes de se rendre dans les zones où le virus est présent. Il est également conseillé aux femmes vivant dans ces zones dites endémiques de reporter leur plan de grossesse tant que le virus est là. De plus, comme dans toutes les épidémies transmises par les moustiques, il est conseillé d'utiliser des moustiquaires et des répulsifs si vous voyagez dans les pays concernés.

Quels examens après un séjour en zone à risque pendant la grossesse ?

Selon le Dr Ami et l'ensemble du Conseil professionnel national de gynécologie et d'obstétrique, il est de bon ton de considérer toute personne revenant d'une zone d'endémie au virus Zika comme potentiellement touchée.L'Institut Pasteur est en train de se mettre en place avec le Haut Comité de Santé Publique pour aider les praticiens à savoir s'il faut ou non tester la présence du virus chez leurs patients, selon le pays visité et la date de retour.

Pour les femmes enceintes de retour d'un séjour en zone endémique, le CNPGO recommande aux praticiens d'effectuer Sérologie du virus Zika et mettre en place Surveillance rapprochée en cas de doute, en mesurer le tour de tête du fœtus à chaque échographie. « Cette simple mesure permettra d'observer ou non la présence de ce que l'on craint, c'est-à-dire l'apparition d'une malformation ou, en tout cas, de ne pas la rater. », souligne le Dr Ami.

Zika et grossesse : que faire en cas d'infection avérée ?

Malheureusement il n'y a pas pas de traitement spécifique contre le virus Zika à l'heure actuelle. De même, il existe actuellement pas de vaccin pour freiner l'épidémie, même si la recherche s'efforce d'en trouver un au plus vite.

Aussi, si une personne a contracté le virus et présente des symptômes, il s'agira simplement de mettre en place traitement symptomatique. Des analgésiques seront prescrits pour les maux de tête et les douleurs, des médicaments contre les démangeaisons, etc. Il n'y a cependant aucun moyen d'empêcher la personne infectée d'avoir tous ces symptômes. Pour une femme enceinte, c'est un peu la même chose : il n'existe actuellement aucun moyen connu de l'empêcher de transmettre le virus Zika à son bébé.

La procédure consistera à essayer d'évaluer la risque de microcéphalie pour le bébé et surveillez les signes de cette anomalie. Lorsqu'une femme enceinte est touchée, elle doit être suivie dans un centre de diagnostic prénatal pluridisciplinaire, où l'équipe médicale effectuera régulièrement des échographies diagnostiques. Lorsque l'infection est avérée, " il n'y a pas que le tour de tête à surveiller »Dit le Dr Ami. " Il y a aussi les yeux (présence de microphtalmie) et le cerveau. Nous vérifierons l'absence de calcifications, qui précèdent l'apparition de lésions cérébrales, l'absence de kystes ou d'anomalies corticales. Cependant, ces dépistages ne font pas partie de ceux habituellement pratiqués en cabinet. »

Zika et grossesse : une amniocentèse pour vérifier la présence du virus

Pour conforter le diagnostic, le Dr Ami précise qu'une amniocentèse peut également être réalisée. " Nous allons essayer de mettre en évidence le virus Zika dans le liquide amniotique par amniocentèse, mais seulement si la femme enceinte elle-même est infectée et son enfant a des anomalies cérébrales à l'échographie ", Il explique. " Si elle le transmet à son enfant, ce dernier excrétera le virus dans le liquide amniotique, surtout entre le 3e et le 5e jour suivant l'infection. Le liquide amniotique étant un milieu plutôt fermé, on peut retrouver des traces du virus quelques jours, voire quelques semaines plus tard. Il continue. " Cette confirmation permettra d'identifier le taux d'anomalies observées et liées à ce virus. », ce qui fera avancer la recherche.

Si l'équipe médicale est quasiment certaine que l'enfant présente un risque élevé d'arriération mentale, le couple peut demander une interruption médicale de grossesse, une procédure autorisée en France sous certaines conditions, mais qui reste interdite dans de nombreux pays touchés (notamment au Brésil). En France, cela devrait être accepté sans problème si le retard mental est avéré au vu des anomalies observées à l'échographie. Le Dr Ami précise que enfants nés avec une microcéphalie ” avoir une espérance de vie à peu près normale, des interactions sociales presque normales, mais un retard moteur qui complique, entre autres, l'acquisition de la marche et de la parole. »

Il ne faut pas oublier non plus qu'une femme enceinte peut être infectée par le virus Zika, mais ne pas le transmettre à votre fœtus. C'est ce qui dérange aussi bien les médecins que les chercheurs.

Zika et femme enceinte : quid de l'allaitement ?

« Il y a actuellement aucune raison d'interdire l'allaitement chez une femme, même si elle est infectée Dit le Dr Ami. " À ce jour, il n'y a aucun cas publié de formes sévères d'infection par le virus Zika chez les nourrissons ou les jeunes enfants. Le virus va leur provoquer les mêmes symptômes que chez les adultes, mais pas de problème de malformation cérébrale puisque le cerveau est déjà formé Il continue. Par ailleurs, le Dr Ami souligne qu'il n'est pas certain que le virus Zika, s'il est présent dans le lait maternel, ait un pouvoir infectieux. " Que faire si une femme contracte le virus après avoir accouché pendant l'allaitement, les risques pour le cerveau du bébé semblent presque nuls, selon les premiers éléments qui ressortent de la littérature scientifique. "Il y a donc" aucune raison d'interdire l'allaitement aux femmes à ce stade », concluez-vous Dr Ami.

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