Famille recomposée : comment aimer l'enfant de l'autre ?

Mélanie n'est pas la seule belle-mère à se retrouver en échec face au défi d'une famille recomposée...

Choisir un homme, ce n'est pas choisir ses enfants !

Les statistiques sont édifiantes : plus des deux tiers des remariages se terminent par une séparation alors que les partenaires ont déjà des enfants ! La cause : les conflits entre beaux-parents et beaux-enfants. Chacun se lance dans cette aventure avec un maximum de bonne volonté, d'amour, d'espoir, mais le succès escompté n'est pas forcément au rendez-vous. Pourquoi un tel taux de fiascos ? A cause des nombreux leurres qui empêchent les protagonistes d'avoir une vision réaliste de ce qui les attend réellement lorsqu'ils s'engagent dans ce modèle familial. L'un des premiers, redoutables leurres, est cette croyance généralisée que l'amour, par sa seule puissance, surmonte toutes les difficultés, renverse tous les obstacles. Ce n'est pas parce qu'on aime follement un homme qu'on va aimer nos enfants ! Au contraire même. Se rendre compte que vous devez partager l'homme que vous aimez n'est pas facile, surtout lorsque ses enfants signifient que vous n'êtes pas le bienvenu. Il n'est pas non plus facile d'aimer un enfant d'une union précédente qui incarne de manière vivante qu'il y avait eu une autre femme dans le passé, une autre relation qui comptait pour son compagnon. Même pour celles qui ont les meilleures intentions du monde et qui sont prêtes à se demander ce que réagit cette jalousie à leur histoire personnelle, et pourquoi elles se sentent si menacées par cette ex-petite amie qui n'est plus une rivale en amour. Notre société considère qu'une femme aime les enfants, les siens bien sûr, et ceux des autres. N'est-il pas normal de ne pas se sentir « maternel » avec un enfant qui n'est pas le vôtre ?

Pour Pauline, la belle-mère de Chloé, 4 ans, le problème est plus important, elle n'apprécie pas du tout sa belle-fille : « C'est difficile à admettre, mais je n'aime pas cette petite fille. Je n'ai rien contre elle, mais je n'ai aucun plaisir à m'occuper d'elle, je la trouve capricieuse, agaçante, loufoque, pleurnicharde et j'attends avec impatience la fin du week-end. Je fais semblant de l'aimer parce que je sais que c'est ce que son père attend de moi. Il veut que tout se passe bien quand sa fille est avec nous, et surtout pas de conflits. Je joue donc le rôle, mais sans réelle conviction. " 

Inutile de vous culpabiliser, vous avez choisi d'aimer cet homme mais pas ses enfants. On ne se force pas à aimer, c'est là, c'est super, mais ce n'est pas la fin du monde, sinon. Nous aimons rarement nos beaux-enfants dès le premier instant, nous les apprécions au fil du temps, cela peut prendre des mois voire des années. Inutile de se forcer car l'enfant percevra si l'attitude maternelle est feinte. Découvrir la maternité avec l'enfant d'un autre n'est pas facile. L'idéal est de se remettre en question et de poser les bases avant de les rencontrer, de s'imaginer dans cette configuration, de parler de ses peurs, de ses peurs, définir les rôles de chacun : quelle place allez-vous prendre avec mes enfants ? Qu'est-ce que vous voulez faire? Et vous, qu'attendez-vous de moi ? On évite bien des querelles à venir en fixant d'emblée des limites concrètes à ce que l'on s'engage à faire et à ce que l'on ne veut absolument pas faire : « Je ne les connais pas, mais je me réserve le droit de le faire. , mais pas ça. Je suis d'accord pour faire les courses, préparer les repas, laver ses vêtements, mais je préfère que tu t'occupes de lui faire prendre son bain, que tu lui lis les histoires du soir pour l'endormir, que toi. emmenez-les jouer dans le parc. Pour l'instant, je ne suis pas à l'aise avec les bisous, les câlins, ce n'est pas un rejet, ça peut changer au fil des mois, mais il faut le comprendre. "

Famille recomposée : il faut du temps pour apprivoiser

S'il faut du temps à une belle-mère pour apprivoiser ses beaux-enfants, l'inverse est vrai. Mathilde l'a vécu avec Maxence et Dorothée, deux petits lutins de 5 et 7 ans : « Leur père m'a dit : 'tu verras, ma fille et mon fils t'adoreront ». En fait, ils m'ont traité comme un intrus, ils ne m'ont pas écouté. Maxence refusait de manger ce que je préparais et parlait tout le temps de sa mère et de sa merveilleuse cuisine. Mathilde venait toujours s'asseoir entre son père et moi, et avait une crise dès qu'il me prenait la main ou m'embrassait ! » Même si c'est dur à supporter, il faut comprendre que l'agressivité d'un enfant voyant une nouvelle femme débarquer dans sa vie est naturelle, parce qu'il réagit à la situation qui le stresse et non à vous en tant que personne. Christophe Fauré conseille la dépersonnalisation pour arranger les choses : « C'est la place unique que vous occupez, votre statut de belle-mère, qui que vous soyez, qui motive l'hostilité de l'enfant. Tout nouveau compagnon serait confronté aux mêmes difficultés relationnelles que vous rencontrez aujourd'hui. Le comprendre aide à dépersonnaliser les attaques et les agressions qui vous ciblent. L'agressivité est aussi liée à l'expérience de l'insécurité, l'enfant craint de perdre l'amour de son parent, il pense qu'il l'aimera moins. C'est pourquoi il est essentiel de le rassurer et de le sécuriser en lui réaffirmant combien il compte, en lui disant avec des mots simples que l'amour parental existe pour toujours, quoi qu'il arrive, même si sa maman et son papa se sont séparés, même s'ils vivent avec un nouveau partenaire. Il faut laisser le temps, ne pas pousser les beaux-enfants et ils finissent par s'adapter. S'ils voient que leur belle-mère/père est un facteur de stabilité pour leur père/mère et pour eux-mêmes, si elle est là, si elle tient contre vents et marées, si elle apporte équilibre, joie de vivre, sécurité dans la maison, leurs perspectives deviendront positives.

En cas d'hostilité très marquée, une belle-mère peut choisir de déléguer la discipline au père pour ne vous imposez pas de manière trop autoritaire. C'est ce qu'a fait Noémie, la belle-mère de Théo, 4 ans : « Je me suis positionnée sur l'agréable, je l'ai emmenée sur une balançoire, au zoo, pour progressivement prendre confiance en elle. Petit à petit, j'ai pu imposer mon autorité en douceur. "

Candice, elle a choisi de s'investir au moins dans la relation avec sa belle-fille Zoé, 6 ans : "Comme j'ai vu que le courant passait mal entre Zoé et moi, et que je ne me voyais pas faire" la gendarmette qui hurle tout le temps », j'ai laissé son père se débrouiller au maximum pendant le week-end. J'en ai profité pour voir des amis, faire du shopping, aller au musée, chez le coiffeur, pour prendre soin de moi. J'étais content, Zoé et mon copain aussi, car il avait besoin de voir sa fille en face à face, sans la méchante belle-doche ! La coparentalité est un choix et un beau-parent n'est pas obligé de se positionner en porteur de la loi s'il ne le souhaite pas. C'est à chaque famille recomposée de trouver le modus vivendi qui lui convient, à condition de ne pas laisser les beaux-enfants faire la loi, car ce n'est pas bon pour eux ni pour les parents.

Lorsque les beaux enfants refusent l'autorité de leur belle-mère, il est impératif que leur père pratique la politique du fait accompli et reste solidaire du nouveau venu dans la famille : « Cette dame est ma nouvelle amante. Comme elle est majeure, qu'elle est ma compagne et qu'elle vivra avec nous, elle a le droit de vous dire quoi faire dans cette maison. Vous n'êtes pas d'accord, mais c'est comme ça. Je t'aime, mais je serai toujours d'accord avec elle car nous en avons discuté ensemble. « Face aux attaques classiques du type : « Tu n'es pas ma mère ! », Préparez vos répliques – Non, je ne suis pas votre mère, mais je suis l'adulte de cette maison. Il y a des règles, et elles s'appliquent à vous aussi ! – Une précision s'impose aussi face à un enfant qui fait continuellement référence à sa mère lorsqu'il passe le week-end avec son père : « Quand tu parles de ta mère tout le temps, ça me fait mal. Je la respecte, elle doit être une super maman, mais quand tu es à la maison, ce serait sympa de ta part de ne pas en parler. "

La difficulté plus ou moins grande à imposer son autorité est en partie liée à l'âge des enfants dont la belle-mère devra s'occuper. A priori, c'est plus facile avec les tout-petits car ils ont vécu le divorce comme un traumatisme violent et ils ont un grand besoin de sécurité émotionnelle. Le nouveau compagnon, la nouvelle maison, la nouvelle maison, leur permettent de se repérer, de savoir où ils sont dans le monde. Comme l'explique Christophe André : « Les enfants de moins de 10 ans sont généralement moins résistants à l'autorité d'un beau-parent. Ils s'adaptent plus vite, ils sont plus accommodants, les règles leur sont plus facilement imposées. Surtout si la jeune belle-mère prend la peine de interroger le papa sur les petits rituels et les habitudes de l'enfant pour renforcer son sentiment de sécurité retrouvée. » Il dort avec son doudou comme ça, elle aime qu'on lui raconte telle ou telle histoire avant de s'endormir, il adore les tomates cantonaises et le riz, au petit déjeuner elle mange du fromage, sa couleur préférée est le rouge, etc.

Le dialogue avec le père est essentiel

Toutes ces informations permettent de créer rapidement une certaine complicité à condition, bien entendu, que la parole de la mère ne gêne pas tout. C'est ce qu'a compris Laurène, belle-mère de Lucien, 5 ans :

Si un minimum de communication est possible entre la mère et le nouveau partenaire, s'ils sont capables de discuter de l'intérêt supérieur de l'enfant, c'est mieux pour tout le monde. Mais ce n'est pas toujours possible. On comprend aisément qu'une mère soit jalouse, soucieuse de confier ses enfants à un parfait inconnu, mais son hostilité peut devenir un réel danger pour le couple et la famille recomposée. C'est le constat amer de Camille : « Quand j'ai rencontré Vincent, je n'aurais jamais imaginé que son ex-femme aurait une telle influence sur mon quotidien. Elle donne des instructions, me critique, change de week-end à sa guise et essaie de saper notre relation en manipulant sa fille de 4 ans. Pour résoudre une telle situation, le dialogue avec le père est essentiel. C'est à lui de fixer des limites et recadrer son ex-petite amie chaque fois qu'elle interfère avec le fonctionnement de sa nouvelle famille. Pour leur sérénité émotionnelle, Christophe Fauré recommande aux belles-mères de faire preuve de respect envers l'ex de leur conjoint, rester neutre, ne jamais la critiquer devant les beaux-enfants, ne pas placer l'enfant dans une situation où il doit choisir entre sa belle-mère et son parent (il prendra toujours le parti de ses parents, même s'il se trompe) et se comporter ni comme rival ni comme substitut. Il leur suggère également d'éviter les démonstrations d'amour devant les enfants pour ne pas les retenir. Avant, leur papa embrassait leur maman, c'est un choc pour eux et ils n'ont pas à être impliqués dans la sexualité adulte, ce ne sont pas leurs affaires. Si vous suivez ces bons conseils, il est possible de fonder une famille recomposée réussie. Malgré les difficultés rencontrées, rien n'est définitivement figé dans les relations avec vos beaux-enfants. Avec le temps, tout peut évoluer, s'effilocher et devenir carrément amusant. Vous ne serez ni la « mauvaise belle-mère » ni la parfaite super-belle-mère, mais vous finirez par trouver votre place ! 

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