Psychologie

Les enfants répètent inconsciemment les scénarios familiaux de leurs parents et transmettent leurs traumatismes de génération en génération - c'est l'une des idées principales du film «Loveless» d'Andrei Zvyagintsev, qui a reçu le prix du jury au Festival de Cannes. Il est clair et repose sur la surface. Le psychanalyste Andrey Rossokhin offre une vision non triviale de cette image.

Les jeunes époux Zhenya et Boris, parents d'Alyosha, 12 ans, divorcent et ont l'intention de changer radicalement leur vie : créer de nouvelles familles et recommencer à vivre à zéro. Ils font ce qu'ils avaient prévu de faire, mais à la fin, ils établissent des relations comme celle qu'ils fuyaient.

Les héros de l'image ne sont pas capables de s'aimer vraiment, ni eux-mêmes, ni l'un l'autre, ni leur enfant. Et le résultat de cette aversion est tragique. Telle est l'histoire racontée dans le film Loveless d'Andrey Zvyagintsev.

C'est réel, convaincant et tout à fait reconnaissable. Cependant, en plus de ce plan conscient, le film a un plan inconscient, qui provoque une réponse émotionnelle très forte. À ce niveau inconscient, pour moi, le contenu principal n'est pas des événements extérieurs, mais les expériences d'un adolescent de 12 ans. Tout ce qui se passe dans le film est le fruit de son imagination, de ses sentiments.

Le mot principal dans l'image est la recherche.

Mais avec quel type de recherche peut-on relier les expériences d'un enfant en âge de transition précoce ?

Un adolescent cherche son « je », cherche à se séparer de ses parents, à se distancer intérieurement

Il cherche son « je », cherche à se séparer de ses parents. Prendre ses distances intérieurement, et parfois littéralement, physiquement. Ce n'est pas un hasard si c'est à cet âge que les enfants s'enfuient particulièrement souvent de chez eux, dans le film on les appelle des "coureurs".

Pour se séparer de son père et de sa mère, un adolescent doit les désidéaliser, les dévaloriser. Permettez-vous non seulement d'aimer vos parents, mais aussi de ne pas les aimer.

Et pour cela, il a besoin de sentir qu'ils ne l'aiment pas non plus, qu'ils sont prêts à le refuser, à le mettre dehors. Même si tout va bien dans la famille, les parents couchent ensemble et s'aiment, un adolescent peut vivre sa proximité comme une aliénation, un rejet de lui. Cela le rend effrayé et terriblement solitaire. Mais cette solitude est inévitable dans le processus de séparation.

Pendant la crise d'adolescence, l'enfant éprouve des sentiments conflictuels déchirants : il veut rester petit, baigner dans l'amour parental, mais pour cela il doit être obéissant, pas cassant, répondre aux attentes de ses parents.

Et d'autre part, il y a un besoin grandissant en lui de détruire ses parents, de dire : « Je te déteste » ou « Ils me détestent », « Ils n'ont pas besoin de moi, mais je n'ai pas besoin d'eux non plus. ”

Dirigez votre agressivité sur eux, laissez l'aversion entrer dans votre cœur. C'est un moment colossalement difficile et traumatisant, mais cette libération du diktat parental, de la tutelle est le sens du processus de transition.

Ce corps tourmenté que l'on voit à l'écran est le symbole de l'âme d'un adolescent tourmenté par ce conflit interne. Une partie de lui s'efforce de rester amoureux, tandis que l'autre s'accroche à l'aversion.

La recherche de soi, de son monde idéal est souvent destructrice, elle peut aboutir au suicide et à l'autopunition. Rappelez-vous comment Jérôme Salinger disait dans son célèbre livre — « Je me tiens au bord d'une falaise, au-dessus d'un gouffre… Et mon travail est d'attraper les enfants pour qu'ils ne tombent pas dans le gouffre.

En fait, chaque adolescent se tient au-dessus de l'abîme.

Grandir est un abîme dans lequel il faut plonger. Et si l'aversion aide à faire le saut, alors vous pouvez sortir de cet abîme et vivre en ne comptant que sur l'amour.

Il n'y a pas d'amour sans haine. Les relations sont toujours ambivalentes, chaque famille a les deux. Si les gens décident de vivre ensemble, l'affection naît inévitablement entre eux, l'intimité - ces fils qui leur permettent de rester ensemble au moins pour une courte période.

Une autre chose est que l'amour (quand il y en a très peu) peut aller si loin "dans les coulisses" de cette vie qu'un adolescent ne le ressentira plus, ne pourra plus s'y fier, et le résultat peut être tragique .

Il arrive que les parents répriment l'aversion de toutes leurs forces, la cachent. "Nous sommes tous si semblables, nous faisons partie d'un tout et nous nous aimons." Il est impossible d'échapper à une famille dans laquelle l'agressivité, l'irritation, les différences sont complètement niées. Comme il est impossible pour la main de se séparer du corps et de vivre une vie indépendante.

Un tel adolescent ne gagnera jamais son indépendance et ne tombera jamais amoureux de quelqu'un d'autre, car il appartiendra toujours à ses parents, fera partie d'un amour familial absorbant.

Il est important que l'enfant perçoive aussi l'aversion — sous forme de querelles, de conflits, de désaccords. Lorsqu'il sent que la famille peut y résister, y faire face, continuer à exister, il prend l'espoir d'avoir lui-même le droit de faire preuve d'agressivité pour défendre son opinion, son « moi ».

Il est important que cette interaction d'amour et d'aversion ait lieu dans chaque famille. Pour qu'aucun des sentiments ne soit caché dans les coulisses. Mais pour cela, les partenaires doivent faire un travail important sur eux-mêmes, sur leurs relations.

Repensez vos actions et vos expériences. Ceci, en fait, appelle l'image d'Andrei Zvyagintsev.

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