Psychologie

La vie en ville est pleine de stress. Un journaliste de Psychologies a raconté comment, même dans une métropole bruyante, on peut apprendre à remarquer le monde qui l'entoure et retrouver la tranquillité d'esprit. Pour ce faire, elle a suivi une formation auprès de l'écopsychologue Jean-Pierre Le Danfu.

« Je veux vous décrire ce que l'on voit de la fenêtre de notre bureau. De gauche à droite : la façade vitrée à plusieurs étages de la compagnie d'assurance, elle reflète le bâtiment où nous travaillons ; au centre - des immeubles de six étages avec des balcons, tous exactement les mêmes; plus loin, les restes d'une maison récemment démolie, des débris de construction, des figurines d'ouvriers. Il y a quelque chose d'oppressant dans ce quartier. Est-ce ainsi que les gens devraient vivre ? Je pense souvent que lorsque le ciel baisse, que la salle de rédaction devient tendue ou que je n'ai pas le courage de descendre dans le métro bondé. Comment trouver la paix dans de telles conditions ?

Jean-Pierre Le Danf vient à la rescousse : je lui ai demandé de venir du village où il habite afin de tester par lui-même l'efficacité de l'écopsychologie.

C'est une nouvelle discipline, passerelle entre psychothérapie et écologie, et Jean-Pierre en est l'un des rares représentants en France. "Beaucoup de maladies et de troubles - cancer, dépression, anxiété, perte de sens - sont probablement le résultat de la destruction de l'environnement", m'a-t-il expliqué au téléphone. Nous nous reprochons de nous sentir comme des étrangers dans cette vie. Mais les conditions dans lesquelles nous vivons sont devenues anormales.

La tâche des villes du futur est de restaurer la naturalité pour que vous puissiez y vivre

L'écopsychologie prétend que le monde que nous créons reflète nos mondes intérieurs : le chaos dans le monde extérieur est, par essence, notre chaos intérieur. Cette direction étudie les processus mentaux qui nous relient à la nature ou nous en éloignent. Jean-Pierre Le Danf exerce habituellement comme écopsychothérapeute en Bretagne, mais il aimait l'idée d'essayer sa méthode en ville.

« La tâche des villes du futur est de restaurer la naturalité pour que vous puissiez y vivre. Le changement ne peut commencer que par nous-mêmes. L'écopsychologue et moi entrons dans la salle de conférence. Mobilier noir, murs gris, moquette avec un motif de code-barres standard.

Je suis assis les yeux fermés. "Nous ne pouvons pas entrer en contact avec la nature si nous n'avons pas de contact avec la nature la plus proche - avec notre corps, Jean-Pierre Le Danf m'annonce et me demande de faire attention au souffle sans chercher à le modifier. – Regardez ce qui se passe en vous. Que ressentez-vous dans votre corps en ce moment ? Je me rends compte que je retiens mon souffle, comme si j'essayais de réduire le contact entre moi et cette pièce climatisée et l'odeur du revêtement.

Je sens mon dos voûté. L'écopsychologue poursuit tranquillement : « Surveillez vos pensées, laissez-les flotter comme des nuages ​​quelque part au loin, dans votre ciel intérieur. Que réalisez-vous maintenant ?

Reconnectez-vous avec la nature

Mon front est ridé de pensées anxieuses : même si je n'oublie rien de ce qui se passe ici, comment puis-je écrire à ce sujet ? Le téléphone a bipé - qui est-ce? Ai-je signé l'autorisation pour que mon fils fasse la sortie scolaire ? Le courrier arrivera dans la soirée, vous ne pouvez pas être en retard… Un état épuisant d'état de préparation permanent au combat. « Observez les sensations qui viennent du monde extérieur, les sensations sur votre peau, les odeurs, les sons. Que réalisez-vous maintenant ? J'entends des pas précipités dans le couloir, c'est quelque chose d'urgent, le corps se tend, c'est dommage qu'il fasse frais dans le hall, mais il faisait chaud dehors, les bras croisés sur la poitrine, les paumes chauffant les mains, l'horloge tourne, tic-tac, les ouvriers dehors font du bruit, les murs s'effondrent, bang, tic-tac, tic-tac, rigidité.

« Quand vous êtes prêt, ouvrez lentement les yeux. » Je m'étire, je me lève, mon attention est attirée par la fenêtre. Le brouhaha se fait entendre : la récréation a commencé à l'école d'à côté. « Qu'est-ce que tu réalises maintenant ? » Contraste. L'intérieur sans vie de la salle et la vie à l'extérieur, le vent secoue les arbres de la cour de l'école. Mon corps est dans une cage et les corps des enfants qui gambadent dans la cour. Contraste. Désir de sortir.

Une fois, voyageant à travers l'Ecosse, il a passé la nuit seul dans une plaine sablonneuse - sans montre, sans téléphone, sans livre, sans nourriture.

Nous sortons à l'air frais, où il y a quelque chose de semblable à la nature. « Dans le hall, lorsque vous vous êtes focalisé sur le monde intérieur, votre œil s'est mis à chercher ce qui répondait à vos besoins : mouvement, couleur, vent », explique l'écopsychologue. — En marchant, fiez-vous à votre regard, il vous conduira là où vous vous sentirez bien.

Nous nous dirigeons vers le talus. Les voitures rugissent, les freins grincent. Une écopsychologue raconte comment la marche va nous préparer à notre objectif : trouver un espace vert. « Nous ralentissons avec des carreaux de pierre posés au bon intervalle. Nous allons vers la paix pour fusionner avec la nature. La pluie légère commence. Avant, je cherchais un endroit où me cacher. Mais maintenant, je veux continuer à marcher, ce qui ralentit. Mes sens s'aiguisent. Odeur estivale d'asphalte mouillé. L'enfant s'enfuit de sous le parapluie de la mère en riant. Contraste. Je touche les feuilles sur les branches inférieures. Nous nous arrêtons au pont. Devant nous se trouve un puissant courant d'eau verte, des bateaux amarrés se balancent tranquillement, un cygne nage sous un saule. Sur la balustrade se trouve une boîte de fleurs. Si vous les regardez à travers, le paysage deviendra plus coloré.

Reconnectez-vous avec la nature

Du pont, nous descendons vers l'île. Même ici, entre gratte-ciel et autoroutes, on trouve une oasis de verdure. La pratique de l'écopsychologie se compose d'étapes qui nous rapprochent constamment d'un lieu de solitude..

En Bretagne, les élèves de Jean-Pierre Le Danf choisissent eux-mêmes un tel lieu et y restent une heure ou deux pour ressentir tout ce qui se passe en eux et autour d'eux. Lui-même une fois, voyageant à travers l'Ecosse, a passé la nuit seul dans une plaine sablonneuse - sans montre, sans téléphone, sans livre, sans nourriture ; allongé sur les fougères, se livrant aux reflets. Ce fut une expérience puissante. Avec l'arrivée des ténèbres, il fut saisi par un sentiment de plénitude d'être et de confiance. J'ai un autre objectif : récupérer intérieurement lors d'une pause dans le travail.

L'écopsychologue donne des consignes : « Continuez à marcher lentement, en étant conscient de toutes les sensations, jusqu'à ce que vous trouviez un endroit où vous vous disiez 'Ça y est'. Restez là, n'attendez rien, ouvrez-vous à ce qui est.

Le sentiment d'urgence m'a quitté. Le corps est détendu

Je me donne 45 minutes, éteins mon téléphone et le mets dans mon sac. Maintenant je marche sur l'herbe, le sol est mou, j'enlève mes sandales. Je suis le chemin qui longe la côte. Tout doucement. Le clapotis de l'eau. Canards. L'odeur de la terre. Il y a un chariot du supermarché dans l'eau. Un sac en plastique sur une branche. Terrible. Je regarde les feuilles. À gauche, un arbre penché. "C'est ici".

Je m'assieds sur l'herbe, m'appuie contre un arbre. Mes yeux sont fixés sur d'autres arbres : sous eux je vais m'allonger moi aussi, les bras croisés tandis que les branches se croisent au-dessus de moi. Vagues vertes de droite à gauche, de gauche à droite. L'oiseau répond à un autre oiseau. Trille, staccato. Opéra vert. Sans le tic-tac obsessionnel de l'horloge, le temps s'écoule imperceptiblement. Un moustique se pose sur ma main : bois mon sang, scélérat — je préfère être ici avec toi, et non dans une cage sans toi. Mon regard vole le long des branches, jusqu'à la cime des arbres, suit les nuages. Le sentiment d'urgence m'a quitté. Le corps est détendu. Le regard va plus loin, vers les pousses d'herbe, les tiges de marguerites. J'ai dix ans, cinq. Je joue avec une fourmi coincée entre mes doigts. Mais il est temps de partir.

Pour en revenir à Jean-Pierre Le Danfu, je ressens la paix, la joie, l'harmonie. Nous revenons lentement au bureau. Nous montons jusqu'au pont. Devant nous, c'est l'autoroute, façades vitrées. Est-ce ainsi que les gens devraient vivre ? Ce paysage me submerge, mais je n'éprouve plus d'angoisse. Je ressens vraiment la plénitude d'être. A quoi ressemblerait notre magazine ailleurs ?

"Pourquoi s'étonner que dans un espace hostile on se durcisse, on atteigne la violence, on se prive de sentiments ?" commente un écopsychologue qui semble lire dans mes pensées. Un peu de nature suffit à rendre ces lieux plus humains.

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